Kirk Douglas : “La route devant nous” — trad @dov rueff

@dov
4 min readSep 26, 2016

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“Je suis dans ma centième année. Quand je suis né, en 1916 à Amsterdam, dans l’état de New-York, c’est Woodrow Wilson qui était notre président.”

Mes parents qui ne savaient ni parler, ni écrire l’anglais étaient des émigrants venus de Russie. Comme plus de deux millions de Juifs, ils fuyaient les progroms meurtriers du Tsar, au début du 20ème siècle. Ils cherchaient une vie meilleure pour leur famille dans un pays magique, dont les rues, ils en étaient convaincus, étaient pavées d’or.

Ce qu’ils ne réalisaient pas jusqu’à leur arrivée, c’était que ces mots si beaux gravés sur la Statue de la Liberté du port de New-York

“Envoyez-moi vos fatigués, vos pauvres
Envoyez-moi vos cohortes qui aspirent à vivre libres”

ces mots ne s’appliquaient pas à tous les Américains à égalité. Les Russes, les Polonais, les Italiens, les Irlandais et particulièrement les Catholiques et les Juifs connaissaient le sentiment d’être considérés comme “à part”, traités comme des étrangers, qui ne deviendraient jamais de “vrais Américains”.

On dit qu’il n’y a jamais rien de neuf sous le soleil. Depuis ma naissance, notre planète a accompli cent fois sa course autour de lui. A chacune de ses orbites, j’ai vu évoluer notre pays et notre monde d’une façon qui aurait paru inimaginable à mes parents — et qui continue à m’émerveiller chaque année d’avantage.

De mon vivant, les Américaines ont gagné le droit de voter et l’une d’entre elle est enfin la candidate d’un des grands partis politiques. Un Catholique d’origine irlando-américaine est devenu président. Et, probablement le plus incroyable de tout cela, c’est qu’un Africain-Américain est notre président actuel.

Plus j’avance en âge, moins je m’étonne de l’inévitabilité des changements, et je me réjouis de constater que tant de ces changements aient été bénéfiques.

Plus j’avance en âge, moins je m’étonne de l’inévitabilité des changements, et je me réjouis de constater que tant de ces changements aient été bénéfiques. Et pourtant, j’ai également vécu les horreurs de la Grande Dépression et des deux guerres mondiales, dont la seconde fut lancée par un homme qui avait promis qu’il redonnerait à son pays sa grandeur passée.

J’avais seize ans, quand cet homme est parvenu au pouvoir, en 1933. Pendant près d’une décennie, avant son ascension, on s’était moqué de lui . . . on ne le prenait pas au sérieux. Il était considéré comme un bouffon, qui ne pourrait certainement pas tromper une population éduquée et civilisée, avec sa réthorique nationaliste et haineuse.

Les “experts” le balayaient d’un revers de la main, ne voyant en lui qu’une plaisanterie. Ils avaient tort.

Il y a quelques semaines, nous avons entendu en Arizona des paroles prononcées qui, de son propre aveu, ont glacé jusqu’au coeur ma femme Anne, née en Allemagne. Ces mots auraient tout aussi bien pu être prononcés en 1933 :

“Nous devons également déclarer avec franchise que parmi ceux qui cherchent à rejoindre notre pays, tous ne seront capables de s’y assimiler avec succès. Nous avons le droit, en tant que nation souveraine, de choisir les immigrants dont nous pensons qu’ils ont le plus de chances de croître et de prospérer chez nous . . . . et cela passe par des nouvelles procédures de tri pour tous les demandeurs, procédures qui comprennennt une certification idéologique, pour s’assurer que ceux que nous laissons entrer dans notre pays partagent nos valeurs. . . “

Ces valeurs ne sont pas les valeurs de l’Amérique, celles pour lesquelles nous avons combattu durant la deuxième Guerre mondiale.

Jusqu’à aujourd’hui, j’avais cru avoir tout vu sous le soleil. Mais, un tel discours de marchand de peur, jamais encore de mon vivant je n’en avais entendu d’un candidat important à la présidentielle américaine .

J’ai vécu une vie longue et heureuse. Si ce mal s’enracine dans notre pays, je ne serai plus là pour en voir les conséquences. Mais vos enfants et les miens seront là. Et leurs enfants à eux. Et les enfants de leurs enfants.

Nous avont tous encore en nous le désir de rester libre. C’est notre marque de fabrique en tant que pays. J’ai toujours été profondément fier d’être Américain. Dans le peu de temps qu’il me reste à vivre, j’espère ne jamais changer d’avis sur ce point. Dans notre démocratie, si nous voulons rester libre, c’est à nous de le décider.

Mon centième anniversaire tombe exactement un mois et un jour après la prochaine élection présidentielle, j’aimerais le célébrer en soufflant les bougies de mon gâteau tout en sifflant l’air de “Happy Days Are Here Again” (“Les beaux jours sont de retour”)

Comme ma très chère amie Lauren Bacall l’a dit un jour, “Vous savez siffler ? Vous rapprochez vos lèvres comme ça et vous soufflez”.

Kirk Douglas

Kirk Dougla, the actor and produce is also the author of 10 books and a book of poems “Life Could Be Verse”

http://www.huffingtonpost.com/entry/the-road-ahead_us_57e03be4e4b08cb1409749f2?

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@dov

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